l'inconnu (4)
La quête
Oeil pour deuil dent pour an, voici ce que me déclare stoïquement la gérante du lavomatique de la rue Broussard. Ma rue. Mon lavomatique.
La chaleur est de suite montée de plusieurs crans. Je ne comprenais rien aux propos et à l'attitude de cette femme et ce depuis 3 ans maintenant, semaine après semaine.
Est-ce qu'elle se foutait de moi? Etait-elle folle? Avait-elle un défaut de prononciation doublé d'une dyslexie comportementale?
L'aigre odeur de lessive atténuée par la douceur de la lumière involontairement tamisée, enveloppait mon esprit et, le regard stupide, je lui souris en guise d'approbation.
Elle avait des seins si imposants qu'on avait peine à croire qu'ils n'étaient que deux. Fondant devant une telle forteresse d'incompréhension, je lui tendis mon linge sale en retenant ma panique.
Elle me dit que lierre qui mousse n'amasse pas l'ours, je supposais que ça voulait dire merci. Je ne pus retenir mon tic nerveux qui s'était déclaré depuis 3 ans lorsque je me retrouvais face à ce sphinx mamelonné; bref je me grattais subtilement mais consciencieusement les burnes.
Je me sentais rapetisser chaque semaine devant la pluralité grandissante de ses seins. Je mis les mains dans les poches pour m'adonner plus discrètement à mon tic aussi nerveux que pressant et allais m'asseoir.
Malheureusement, où que je me place, un miroir me faisait face et je devais me regarder moi afin d'éviter de la regarder elle, penchée sur ses machines en train d'enfourner mes redoutables caleçons usés par des mois de nervosités.
Aucun rideau, aucune cloison, pas un obstacle; la vue était dégagée entre mon regard et les pans ouverts de sa jupe tendue à craquer. Tandis que je m'efforçais de ne pas suivre l'exemple de sa jupe, elle se retourna pour m'annoncer triomphalement: tant va la bûche à saut qu'à la main elle se tasse.
J'exprimais une fois de plus mon accord total en me massant les poches tout en mordillant ma bouche pour faire diversion. Elle était là, debout, les mains sur les hanches, sans expression aucune et je restais là, assis, comme une membrane inerte dans un jean érectile. Tout événement, même le plus terrible, m'aurait rassuré, mais rien ne se passait. Pas même le vol d'une mouche. Nous nous regardions sans mot dire. Elle attendait sans doute quelque chose mais j'étais incapable de deviner quoi me concentrant sur mon tic avec acharnement.
Puis la machine émit son bip final qui fit déclamer à ma gérante tout en se retournant, un bien vaut lieu que ceux du horlà.
Je retirais précipitamment les mains de mes poches, me levais et me rapprochais lentement de sa jupe, les bras tendus, quand elle se retourna de nouveau pour me tendre mon linge propre et plié.
Surprise: elle me souriait. Il y avait sur la pile de linge une feuille, et sur la feuille était écrit: le faux de la main.